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Frédéric Beigbeder a perdu 30 ans grâce à ces méthodes simples et efficaces

Transfusion de sang de jeunes pucelles, thérapie génique, greffe d'organes de porcs, congélation... Beigbeder nous révèle comment vivre 350 ans. Et vous n'allez pas en revenir.
Photos : JF Paga/GRASSET (à gauche) Frédéric Beigebder (à droite)

Frédéric Beigbeder a emménagé au bord de la mer. Il fait du sport tous les matins, regarde ses enfants courir dans le jardin, et mange des légumes oubliés. Que s'est-il passé ? Qu'est-il advenu de l'homme qui tapait des montagnes de cocaïne sur des capots de berlines ? Où est parti celui qui avait érigé l'autodestruction en modèle pour les générations futures ? Réponse : il a eu 52 ans, il a découvert que ses amis se sont rangés, certains même, comme Philippe Vecchi et Jean-Luc Delarue, ne sont plus là. C'est le point de départ de son nouveau roman, Une vie sans fin. Puisque la vieillesse est un naufrage, trouvons un moyen de stopper le processus, voire même, soyons fou : arrêtons de mourir. Frédéric voudrait vivre 350 ans. Alors Frédéric a exploré toutes les techniques développées actuellement pour atteindre l'immortalité. Le résultat, c'est une enquête passionnante au pays des Dr Frankenstein de la médecine et des transhumanistes milliardaires. Toi, jeune lecteur vigoureux et insouciant, lis bien attentivement les conseils de Tonton Freddy. Car bientôt, en un battement de cils, toi aussi tu auras 50 ans, tu mangeras des légumes oubliés et tu surveilleras ton taux de cholestérol en hurlant intérieurement : « il est trop tôt pour mourir.»

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VICE : « Une vie sans fin », c’est le titre de votre livre, mais c’est aussi le rêve de tous les hypocondriaques. Vous en êtes ?
Frédéric Beigbeder : À votre avis ?! Je suis quand même ce mec qui a passé trois ans à écrire un livre sur : « comment ne pas mourir »… J’ai l’impression d’être tout le temps malade. Je tousse, j’ai des rhumes, des otites, des angines. Je fais des check-ups régulièrement pour tout vérifier.

Est-ce que, comme prévu, la peur de mourir augmente avec l’âge ?
Les vieux ont de bonnes raisons d’être plus peureux : ils meurent. De 20 ans à 50 ans, je fréquentais des gens qui étaient fiers de s’autodétruire. Ce qui était chouette, c’était d’être bourré, défoncé, de se foutre de sa santé. Mon livre, c’est l’histoire d’un type qui se rend compte que ses amis, les fêtards, les camarades de nuit, sont passés à autre chose, qu’ils ont arrêté de boire des Vodka Get tous les jours…

Vous vous sentez vieux ?
Surtout depuis l’élection d’Emmanuel Macron : un mec qui a treize ans de moins que moi gouverne ma patrie ? Allo ? Disons qu’il arrive un moment où tu se sens anachronique. Et puis tu t’aperçois aussi qu’à 52 ans, tu mets des jours à récupérer après avoir bu des shots de tequila. Maintenant mon organisme me dit : « Hého Frédéric la gueule de bois maintenant c’est cinq jours, pas cinq heures ! »

De toute façon, brûler la vie par les deux bouts, c’est pas la meilleure stratégie à adopter pour arrêter de mourir…
Et en plus, c’est devenu complètement ringard. On a beaucoup idéalisé la fête et la destruction avec des personnages comme Patrick Bateman, ou même Octave Parango dans 99 francs… Mais ce qui est classe maintenant, c’est de faire des randonnées et d’être vegan. Le héros contemporain, c’est un mec qui monte un escalier imaginaire sur un vélo elliptique en écoutant Vianney. Je ne me suis pas mis au vélo elliptique, mais maintenant, je fais de l’exercice et j’ai même découvert l’existence des fruits et légumes. C’est comme des Haribo mais en plus compliqué à éplucher.

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Ça manque cruellement d’originalité mais comme vous l’expliquez dans votre livre, la technique la plus sûre pour vivre très longtemps, ça reste de faire du sport et de manger sain…
J’ai suivi le régime de l’Hôpital Pompidou : boire de l’eau du robinet – pas de l’eau minérale ! – manger sain, arrêter l’alcool, faire une heure de sport tous les jours. C’est sûr que quand on suit ces règles, on a l’impression que la vie dure beaucoup plus longtemps… tellement on s’emmerde.

OK, ça c’est pour échapper au cancer du pancréas à 35 ans. Mais pour ne plus jamais mourir, on fait comment ?
Déjà, il faut être riche. Les procédures coûtent des millions de dollars, notamment les thérapies géniques. Ce sont les thérapies les plus intéressantes pour supprimer le cancer, qui est une mutation génétique. En 2015, on a guéri le premier bébé atteint de leucémie. L’injection a coûté 1 million d’euros. J’en ai parlé à Jean-François Delfraissy aux états généraux de la bioéthique, il m’a répondu qu’il allait y avoir une médecine à deux vitesses. Ne pas mourir, ça coûte une tonne.

Dans votre quête d’éternité, vous vous êtes fait lasériser le sang. Ça veut dire quoi au juste ?
Ça se passe dans une clinique en Autriche. Poutine y est déjà allé, il paraît que Keith Richards aussi, même s’il nie farouchement. On t’administre des produits et on ajoute un rayon laser dans l’intraveineuse afin d’injecter de la lumière dans ta veine par fibre optique. C’est disco.

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Ça marche ?
T’es un peu boosté, et ça ne peut pas faire de mal quand ton sang a la même fraîcheur que les égouts de Paris. En plus, c’est classe. Tu peux toujours dire : « Je me suis fait lasériser le sang ». Par exemple, est ce que toi tu t’es fait lasériser le sang ?

Non.
Bah voilà, est-ce que tu te sens minable maintenant ?

Oui. Et la transfusion de sang de jeune, vous avez essayé ?
J’étais en liste d’attente pour le faire, mais comme je vais avoir un nouvel enfant, je me suis dit qu’en fait, non, c’était pas indispensable de prendre ce risque. Mais le concept est impressionnant, ça valide les vampires et les zombies. À Harvard, ils ont constaté que quand on relie le système sanguin d’une souris de trois ans avec celui d’une souris de six mois, on observe un rajeunissement phénoménal de leurs organes, le poil de la souris vieille devient plus brillant, sa colonne vertébrale se redresse. La souris peut refaire des exercices qu’elle ne pouvait plus faire, comme de la natation, ou des petites tractions.

C’est vraiment très mignon des souris qui font des petites tractions.
Oui sauf si on se souvient que ce sont des souris vampires. Dans un genre moins mignon, il y a les organes de porc. On peut les modifier, et les greffer sur des humains. L’idée, c’est d’ouvrir des immenses usines avec des porcs de grandes tailles. Tu vois Johnny, il est mort à cause des poumons. Hé bien tu prends des poumons de cochon et tu lui greffes. Ce sera au point dans dix ans. Il y a d’autres choses folles, comme les imprimantes d’organes, les bioprints, qui peuvent copier un organe. Ou encore le mind uploading : ça c’est vraiment la post-humanité. En gros, tu deviens Siri, tu n’es plus un être humain, tu es un logiciel.

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C’est très angoissant.
Je ne sais pas ce qui est pire : devenir Siri ou mourir. Mais l’idée de faire tomber la frontière entre les machines et le biologique est passionnante. On va pouvoir stocker des infos sur des organismes biologiques. Par exemple, on a déjà stocké un film dans une bactérie.

Quel est l’intérêt ?
Apparemment ça conserve très bien les informations. Par exemple, on pourrait conserver toute la bibliothèque de France dans une pomme, ça prend moins de place.

Sauf si un cochon génétiquement modifié croque toute la mémoire du monde…
Cool comme idée ! Vous devriez écrire un bouquin.

Depuis l’écriture de ce livre, vous êtes devenu accro à la tech, « ultra connecté » comme disent les vieilles personnes ?
Pas spécialement. Par exemple, je suis parti de Facebook.

Ah oui, les réseaux sociaux, c’est oppressant.
Facebook, c’est un annuaire d’anciens élèves qui envoient leur CV dans le vide, et qui est utilisé pour surveiller ta vie privée et envoyer des publicités ciblées. Instagram, c’est une soirée diapo interminable. Et Twitter c’est un chauffeur de taxi qui donne son avis sur l’actualité en permanence. Ça ne m’intéresse pas, même si le chauffeur de taxi s’appelle Donald Trump. Tout ça n’est pas très joyeux. Si George Orwell revenait, il serait très flatté d’avoir vu si juste. Et il serait étonné de voir que tout le monde a accepté d’être surveillé. Il n’y a pas même eu besoin d’un régime totalitaire pour obtenir la surveillance de tous les citoyens du monde : les gens sont volontaires contre quelques likes.

Un jeune dirait certainement que c’est un discours de vieux con
C’est exactement un discours de vieux con. Je trouve que « c’était mieux avant », parce qu’avant, j’étais jeune. Cela dit : j’ai des amis qui font quatorze ou quinze posts par jour, ça leur prend tout leur temps et ils ne sont pas payés. Ça c’est un truc de jeune con ! Ils travaillent gratuitement pour Facebook, Twitter et Instagram. Quand on regarde les chiffres d’affaires de ces entreprises, on se rend compte que c’est complètement débile de passer des heures à réfléchir à des idées pour alimenter ces réseaux. J’ai pas envie de me demander « tiens, qu’est ce que je pourrais écrire de génial en moins de 240 signes ? » Moi, je préfère faire un post tous les quatre ans, qui fait 338 pages, et qui coûte 22 euros. Ça s’appelle un livre.

Justement, écrire, c’est le meilleur moyen de ne jamais mourir non ?
C’est vrai si tu es Vladimir Nabokov. Ce n’est pas mon cas.

Le seul vrai moyen de devenir immortel, ça serait donc de se reproduire ?
Oui. Tu as ton code génétique dans un ou plusieurs individus qui courent dans le jardin. Tu es éternel, et en plus c’est mignon.

Une vie sans fin, Frédéric Beigbeder, Grasset, 338 pages, 22 €.