jimmy gourad

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Sport

J’ai passé un an à photographier le boxeur Jimmy Gourad, de Bruxelles au Maroc

Apprendre à connaître le mec qui a côtoyé Joey Starr, Mickey Rourke, JCVD ou encore Depardieu a été une des expériences les plus marquantes de ma vie.

J’ai rencontré Jimmy Gourad à la sortie d’un cours de boxe, à Ixelles. La première chose qui m’a marqué chez lui, c’était sa gueule. Burinée et bourinée au fil des combats. Sa grande gueule aussi, qui m’a poussé à essayer de savoir ce qui se cachait derrière. Mais cette gueule, son histoire et les photos que j’ai prises pendant un an et demi ont vite fini par m’affecter. Parti d’un simple sujet photo pour mes études, je me suis retrouvé avec l’expérience la plus marquante de ma vie. Aujourd’hui je tente de faire éditer un livre qui retrace toute cette histoire.

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Au début, c’était compliqué. Quand t’es un jeune photographe et que t’essaies de capter la personnalité d’un type qui s’est donné en spectacle tout au long de son existence, il faut du temps. Cinq mois, précisément, avant que j’arrive à choper un regard sincère de la part de Jimmy. Pas que ça lui ait plu. Lui, c’est le guerrier, le méchant dans les films d’action à la JCVD, la star montante de sa génération et l’un des premiers boxeurs maghrébins de Belgique, pas un type qui s’est fait avoir par la vie. Pourtant, c’était ça que je voulais réussir à canaliser, c’était ça qui m’intéressait : des moments de vide dans son intensité.

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Au fil du temps, le fait de toujours vouloir mieux le connaître m’a valu des problèmes, des engueulades, des moments où il ne voulait plus me voir. C’étaient des pauses à temps variable, qui pouvaient durer vingt-quatre heures ou plusieurs jours. Mais il revenait toujours comme si de rien n’était, m’annonçant qu’il avait un nouveau projet, que ce soit un film, un combat ou des cours de boxe, et que je devais absolument lui tirer le portrait pour en garder une trace.

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Je l’ai suivi comme ça, sur tous ses projets, qu’ils soient aboutis ou non. De plus en plus, je laissais la distance propre à un photographe envers son sujet s’effriter, et j’avais l’impression de devenir un ami pour lui. Apprendre à le connaître est devenu de moins en moins un travail. On a fini par se voir presque tous les jours.

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J’ai continué de le suivre. J’ai même fini par le suivre jusqu’au Maroc. Un tournage avec Mohamed Qissi, meilleur pote de Jean Claude Van Damme, et un des « amis de la jet set » de Jimmy, entre Mickey Rourke, Joey Starr, Jamel Debbouze ou Depardieu, acteurs qu’il a rencontrés au fil de sa carrière, en enchaînant des rôles de figuration. C’est sans doute là-bas, dans son pays natal et dans l’intimité des chambres d’hôtel, que j’ai le mieux appris à le comprendre.

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C’était une chose de le voir créer des « arts martiaux du désert » pour faire rire ses potes sur le plateau. C’en était une autre d’être témoin de sa réaction dans les loges, quand on lui a annoncé qu’on allait prendre ses mesures pour lui faire des costumes, comme un « vrai acteur ». La consécration, après avoir fait des petits rôles sans lignes de dialogue dans une centaine de films. Souvent, il avait ces espèces de moments de flottements, où personne n’était capable de savoir ce à quoi il pensait, où s’il pensait à quoi que ce soit d’ailleurs.

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Faut dire que Jimmy, malgré sa grande gueule, il en a chié. Des matchs truqués où il s’est fait démonter au début de sa carrière en échange d’argent, aux arnaques qu’on lui a faites au moment où il commençait à se faire un nom, en passant par la drogue qu’il s’est enfilée, c’est pas tous les jours faciles d’être dans sa tête. Bien sûr, toutes ses aventures, qu’elles aient ou non eu un succès, il les assume et va jusqu’à les crier haut et fort : c’est bel et bien ça qui lui a permis de se faire un nom, et d’être aujourd’hui inscrit sur la liste des acteurs de combat de référence. De toute façon, tout ça c’est derrière lui.

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C’était aussi intense de le suivre. Un des moments les plus surréalistes qu’on ait pu vivre, c’était sans doute quand on s’est retrouvés paumés au milieu du désert à attendre qu’un taxi passe pour retrouver l’équipe. On aurait pu y rester deux jours, d’après lui. Pas que je m’en sois inquiété.

Aujourd’hui, le Maroc, c’est loin. Jimmy est retourné à ses cours de boxe, et moi à mes reportages. Je le vois plus tellement. Tout ce que je sais, c’est qu’un jour, celui qui se considérait comme la seule personne honnête de la profession – « Ce sont tous des arrivistes », une de ses phrases fétiches – finira par me rappeler pour que je lui tire le portrait.

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On parle aussi de Jimmy sur Vice Sports. « Jimmy Gourad » en exposition chez Peinture Fraîche (Bruxelles)

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